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A propos du travail dominical : « Que l’autorité se borne à être juste » !

29/09/2013 | par L. Hansen-Love | dans Politique | 4 commentaires

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La  loi en France comme dans d’autres pays européens (Allemagne i.e.) règlemente  ou interdit le travail dominical.

Mais,  avec la crise, les dérogations et les assouplissements se sont généralisés en Europe, y compris en Allemagne[1]. En France, la loi en vigueur  date de 1906[2] ! Ne peut-on envisager de la remanier ?

Pour toutes sortes de raisons.  Car le monde a un peu  changé depuis 1906 …
–          Le dimanche n’est plus le « Jour  du Seigneur », mais plutôt celui des loisirs. Or la consommation ou le bricolage en font partie (voire la ruée vers les brocantes par exemple).
–          L’explosion du commerce en ligne impose  une concurrence  d’un type  inédit !
–          Le tourisme en France est une source importante de revenus pour la nation, or la concurrence de Londres, entre autres, ne peut être ignorée.

Plus fondamentalement, la question est celle-ci : appartient-il à la  loi de décider à la place de l’individu des conditions de possibilité de son bonheur ou de son épanouissement ?

Quelques  arguments entendus :

«  Le dimanche doit être consacré à la vie de famille » : et pour ceux qui n’ont pas de famille ? Les célibataires, les vieux, les veufs …

« Nous consommons trop, il ne faut pas pousser davantage les gens à consommer » : certes,  c’est aussi mon avis, mais appartient-il à l’Etat d’en décider à ma place ?

«  L’ouverture des commerces amènera les employés à travailler malgré eux, par besoin d’argent » : soit, mais les gens ne sont-ils pas assez grands pour savoir s’ils veulent gagner plus d’argent ou non ? La loi et les syndicats ont-elles pour vocation d’interdire aux individus de faire ce qui leur plaît, en l’occurrence travailler pour arrondir leurs fins de mois ou bien  s’acheter un sac Vuitton le dimanche ? De toute façon,  ce que l’on ne peut empêcher (la consommation superflue ?), on ne doit pas  l’interdire !

« Tout travailleur a le droit de se reposer 24h de suite » : soit, mais pourquoi le dimanche ? Et pourquoi certaines professions font-elles exception ? Les infirmières, les baby sitter, les profs, les taxis, les serveurs, etc… mais  pas les employés  de Séphora ? Et pourquoi ne pas travailler le soir ou la nuit si cela me convient ?

« On peut toujours différer un achat » (Sylvia Pinel, Ministre de l’Artisanat) : certes, mais de quoi je me mêle !

En guise de conclusion :
Les lois ne sont  pas intangibles. Le monde bouge.
Mais surtout : laissez  moi décider si je veux travailler ou pas, et  consommer ou pas, et à quel moment de la semaine :

« Que l’Autorité se borne à être juste, nous nous chargerons d’être heureux » (Benjamin Constant)

[1] http://www.lefigaro.fr/politique/2009/07/02/01002-20090702ARTFIG00004-travail-du-dimanche-des-pratiques-differentes-selon-les-pays-et-les-traditions-.php
[2]
http://www.linternaute.com/actualite/dossier/07/travailler-le-dimanche/2-que-dit-la-loi.shtml

 

L. Hansen-Love

Professeur agrégée de philosophie, Laurence Hansen-Love a enseigné en terminale et en classes préparatoires littéraires. Aujourd'hui professeur à l'Ipesup, elle est l'auteur de plusieurs manuels de philosophie chez Hatier et Belin. Nous vous conseillons son excellent blog hansen-love.com ainsi que ses contributions au site lewebpedagogique.com. Chroniqueuse à iPhilo, elle a coordonné la réalisation de l'application iPhilo Bac, disponible sur l'Apple Store pour tous les futurs bacheliers.

 

 

Commentaires

Excellent article! Encore une fois on assiste à une tentative de réduire les libertés pour des petits arrangements politiciens ou par idéologie.
Merci pour votre contribution qui rappelle que l’état doit aussi garantir la liberté des citoyens.

par Côme - le 30 septembre, 2013


…Cet article à le mérite de passer en revue toutes les argumentations défavorables au travail dominical pour les réfuter une à une.
Toutefois, les arguments me paraissent manquer un peu leur « cible ». Le meilleur d’entre eux étant encore celui de la citation finale.
C’est Justement cette « justice » qui pose problème et que, nous en sommes d’accord, l’Etat -et donc la loi- doit se borner à la garantir.
Dans cette perspective, comment penser, par exemple, que ceux qui travailleront le dimanche le feront « librement » quand on connaît les deséquilibres du marché du travail?
Au demeurant, il me paraît que la seule approche utile de la question est économique et poser la seule question qui vaille, celle de l’efficacité de cette mesure. Efficace si génératrice de valeur en préservant un équilibre entre tous les acteurs en présence.
Au final donc, il s’agit donc de savoir si le travail dominical correspond à un l’intérêt général dont on a dit qu’il fondait le contrat social…

par Anna92 - le 5 octobre, 2013


N’y a t-il pas une sous estimation de la volonté du MEDEF de défaire le code du travail afin de continuer à imposer précarité, flexibilité ce qui constitue un recul de la démocratie.
Etes vous sûre que la majorité des ouvriers, employés et l’ensemble des salariés sont pour le travail du dimanche?

par LE BON - le 16 novembre, 2013


Bonjour,
relire des articles de « philosophes » sur des sujets de société quelques années plus tard fait apparaitre le véritable motif de ces quelques lignes: sous l’apparence d’une réflexion un véritable plaidoyer (qui ne dit pas son nom!) pour une dérégulation totale du code du Travail (qui rappelons le à Mme LHL) a pour vocation de protéger (un peu!) ceux qui ne possèdent que leur force de travail à monnayer. Mais, au nom d’une « modernité » de circonstance, Mme LHL n’en a cure.
D’ailleurs en 2017 Mme HLH a confirmé avoir de la suite dans les idées (ultra-libérales?) en nous exhortant sous le blabla habituel (pas de NI-NI!)
à voter Macron le serviteur zélé de l’Oligarchie prédatrice.
In fine Mme LHL n’est qu’une des multiples voix du MEDEF.

par Jean-Paul B. - le 15 août, 2019



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