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La grande santé

17/12/2015 | par D. Guillon-Legeay | dans Art & Société | 5 commentaires

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Convalescence

Suite à une récente opération chirurgicale – sans gravité mais qui me contraint néanmoins à une longue immobilité – j’ai décidé de m’accorder le temps de lire, de penser et d’écrire autant que mes forces me le permettent. Le temps est précieux, plus encore quand il s’agit de le passer en compagnie de Montaigne, Aristote, Proust et Spinoza, mes auteurs favoris. De plus, je suis convaincu que l’activité intellectuelle produit sur le corps des effets bénéfiques, au moins autant que l’activité physique. Certes, je concède bien volontiers qu’il me faut prendre mon mal en patience, tenter de convertir un mal en un bien, en somme « faire de nécessité vertu ». Plus positivement, c’est aussi l’occasion de revenir à moi, dans la solitude de la méditation. Il n’empêche, je ne puis me départir de cette conviction: la culture de l’esprit contribue à renforcer l’état du corps.

Mais comment établir une pareille conviction? Car je vois bien qu’elle s’oppose à l’idée courante qui consiste à séparer le corps et l’esprit regardés comme des entités de nature distincte et indépendante, supposés mener des activités spécifiques. Par exemple, lire une œuvre philosophique ou littéraire, regarder un film, est-ce s’adonner à une activité exclusivement intellectuelle ? Se promener dans la forêt, nager le crawl, monter un meuble Ikea, est-ce pratiquer une activité exclusivement physique ? Comment l’esprit interfère-t-il sur la vie secrète du corps ?  Voilà que, peu à peu, je me trouve embarqué comme malgré moi dans une réflexion sur les rapports entre l’esprit et le corps…

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La culture comme remède

Ce qui s’observe et se pratique dans différents centres de soins et de santé apporte des éléments de réponse significatifs. La lecture, le jeu, la parole, les spectacles, les concerts, le cinéma contribuent à améliorer l’état physique et psychique des sujets. Ce constat vaut également pour les patients atteints de maladies dégénératives (notamment celle d’Alzheimer) ; dans les services de gériatrie, on observe que la stimulation intellectuelle, induite par la culture et la parole, permet de retarder les effets de la sénescence. Loin d’être regardée comme un luxe, la culture est utilisée comme un remède.

En premier lieu, il est aisé de comprendre que l’accès à la culture offre aux patients une salutaire opportunité pour créer du lien social, distendu ou rompu sous l’effet de la maladie, du temps, de l’isolement ou encore de la vie moderne. Or, la culture est création collective : s’y adonner, c’est rejoindre le monde hors de soi, mais que l’on porte au-dedans de soi ; c’est vers lui que nous tendons, et c’est par lui que nous nous construisons. S’agissant des personnes atteintes de maladies dégénératives, cet effet de restauration du lien social est certes moindre sur le plan quantitatif (compte tenu de la pathologie et de son degré d’évolution) ; il n’en demeure pas moins très précieux, sur le plan qualitatif, puisqu’il permet à la personne de préserver une part essentielle de son humanité.

Mais dans tous les cas de figure, la question demeure. Comment expliquer que, sur de multiples plans, la culture produise de tels effets bénéfiques sur la santé ? Au coeur de toutes ces questions, ne rencontrons-nous pas l’énigme de l’union du corps et de l’esprit ? Et, si l’on considère les récents développements de la science contemporaine, n’avons-nous pas affaire au mystère du cerveau? N’est-il pas l’athanor dans lequel s’élabore l’alchimie entre nos pensées, nos émotions, nos gènes et nos cellules ?

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Ce que peut le corps 

Cette difficile question de l’union du corps et de l’esprit occupe une place décisive dans la métaphysique classique. Et dans les débats ardus et passionnés qui l’ont animée, je songe aux intuitions que l’on trouve dans l’œuvre de Spinoza, lesquelles restent d’une force et d’une actualité stupéfiantes. Je n’en donnerai ici qu’un très bref aperçu.

Il y a tout d’abord cette interrogation générale de Spinoza, en forme de soupçon, qui porte sur cette croyance selon laquelle l’âme serait la maîtresse du corps :

« Personne n’a jusqu’ici déterminé ce que peut le corps, c’est à dire que l’expérience n’a jusqu’ici enseigné à personne ce que, grâce aux seules lois de la Nature, – en tant qu’elle est uniquement considérée comme corporelle, – le corps peut ou ne peut pas faire et ce qu’il ne peut pas faire à moins d’être déterminé par l’âme. Personne en effet ne connaît si exactement la structure du corps qu’il ait pu en expliquer toutes les fonctions… » (Baruch Spinoza, Ethique, partie 3, prop.2 et scolie) .

Spinoza prend ainsi l’exemple des bêtes, « dont la sagacité dépasse de beaucoup celle des hommes » (ibid), ou encore, celui des somnambules « qui font pendant leur sommeil ce qu’ils n’oseraient pas faire durant la veille » (ibid). Spinoza, s’interrogeant sur les performances des animaux et celles des somnambules, remarque que, lorsque l’esprit se met en état de veille (durant le sommeil notamment), le corps ne perd pas totalement sa capacité d’agir, comme s’il avait une intelligence et une volonté. Dès lors, pour Spinoza, la tâche de la philosophie et de la science doit consister à déterminer rationnellement ce rapport entre l’esprit et le corps et, par conséquent, à remplacer la croyance par un savoir rationnel. Or, la science contemporaine (neurosciences et biochimie), à mesure qu’elle progresse,tend à développer cette connaissance rationnelle de l’union de l’esprit et du corps que Spinoza appelait de ses vœux, et dont il fut en quelque sorte le précurseur [1].

Mais il nous faut poursuivre l’enquête, si nous voulons connaître davantage sur le problème de l’union du corps et de l’esprit. Spinoza pose que « L’âme est l’idée du corps »[2]. En d’autres termes, il récuse la conception dualiste [3] qui traite le corps et l’esprit comme deux réalités indépendantes, relevant deux ordres de réalité distincts, la matière et l’esprit. Il pose, au contraire, que le corps et l’esprit constituent, bien plutôt, deux aspects d’une seule et même réalité, selon qu’on la considère sous l’attribut de la matière ou sous l’attribut de la pensée. Il s’agit là d’une conception moniste originale. Comprendre avec Spinoza, que l’opposition traditionnelle entre la matière et l’esprit ne vaut pas – elle est pure illusion ! – permet de comprendre que le corps et l’esprit constituent deux aspects d’une seule et même réalité, considérée soit sous l’attribut de la matière, soit sous l’attribut de la pensée. Selon Spinoza, l’être humain n’a pas un corps et un esprit, l’un et l’autre accomplissant des activités spécifiques. Non, car l’homme est inséparablement corps et esprit ; il ne peut penser sans le corps, ni se mouvoir sans l’esprit ; l’activité de l’esprit est activité du corps, et réciproquement. Pour atteindre sa pleine puissance intellectuelle, l’homme doit donc développer la puissance d’agir de son corps.

Avec Spinoza, nous obtenons donc une réponse, forte et cohérente, à la question de l’union de l’esprit avec le corps et, par conséquent, à celle de savoir comment l’activité intellectuelle et culturelle peut aider le corps à se fortifier. Et inversement. Sur cette question, Antonio Damasio, neurologue qui étudie le rôle des circuits neuronaux dans les mécanismes émotionnels, reconnaît en Spinoza un précurseur : «Les affects positifs augmentent la capacité à résoudre des problèmes et créer des solutions. Ils favorisent le maintien de la santé ». [4]

J’observe que les découvertes récentes de la neurobiologie tendent à corroborer, bien que par d’autres voies, des réponses qui ont été formulées sur ce sujet, depuis fort longtemps, par d’autres civilisations. Ainsi le souci d’établir et de préserver l’union du corps et de l’esprit est-il au fondement même de la médecine traditionnelle chinoise, ainsi que des arts martiaux, tels qu’ils se pratiquent depuis des millénaires en Asie, en suivant les voies de spiritualité du taoïsme et du bouddhisme. Ainsi, peut-on mesurer aujourd’hui, par des protocoles médicaux objectifs, les effets puissants de la méditation zen sur la santé du corps en général, sur le cerveau et le système immunitaire en particulier. Certains indices suggèrent d’ailleurs la possibilité d’établir, à terme, une convergence entre la philosophie de Spinoza, la science contemporaine occidentale et les philosophies orientales.

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La force du désir

Allons plus loin. Si la stimulation de l’activité cérébrale concourt à la guérison du corps, cette relation entre les deux séries de phénomènes (l’esprit et le corps) s’effectue-t-elle de façon purement mécanique ? Je n’en crois rien. Je crois, au contraire, qu’il y entre une part de désir. Ainsi, un patient déprimé peut refuser de lire ou d’écouter de la musique. Or, nous dit Spinoza, le désir est cet effort de vivre et de persévérer dans son être qui se trouve logé au creux de tout être vivant : le conatus, « force de vie inébranlable et automatique »[5] qui conduit un être vivant à se maintenir en vie, à s’affirmer dans l’être, à résister – avec autant de force qu’il est en lui – contre les attaques qui menacent de le détruire. Le désir ne demande qu’à s’épanouir et à s’augmenter. Lorsqu’il trouve son but et, autour de lui, les conditions favorables, l’individu augmente sa puissance d’agir, et la satisfaction de son désir lui procure de la joie. « Par joie, j’entends une passion par laquelle l’âme passe à une perfection plus grande »[6]. Au contraire, lorsque le désir est empêché de se développer et de s’épanouir, il sombre dans la tristesse : « Par tristesse, j’entends une passion par laquelle l’âme passe à une perfection moindre » [7].

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La grande santé

En même façon, lorsqu’une société, riche et brillante comme l’est la nôtre, tombe dans un état de désarroi moral qui la fait paraître semblable à un grand corps malade, il importe au plus vite de l’aider à renouer avec son désir, en l’occurrence le désir de démocratie, de liberté, d’unité et de prospérité économique. La culture peut-elle jouer ce rôle ? Oui, en partie bien sûr, car il en va pour une société comme pour un individu ! Ainsi, qui ne voit que les êtres curieux d’apprendre, les amis du savoir, de la connaissance sont des êtres mus par une passion joyeuse, créatrice et communicative? Ce désir d’apprendre et d’entreprendre, d’explorer et d’innover, de recueillir et de transmettre est le plus fort et le plus beau des désirs ! Dans cette émulation, il y a une joie du savoir et de la création. En revanche, les fanatiques, repliés dans l’obscurité d’une unique certitude, hermétiques au débat et à la critique, ennemis déclarés de la culture, sont des êtres mus par des passions tristes, aveugles et destructrices : le fanatisme, l’intolérance, le meurtre, la haine, l’exclusion. Cela ne surprendra personne : entre les islamistes et les ténors de l’extrême-droite, on retrouve cette même haine de l’autre (le repli sur la communauté religieuse, ou l’exaltation de la préférence nationale), et aussi cette même misologie (du terme grec signifiant la haine de la raison). Or, la raison est la faculté de l’esprit humain qui, précisément, nous donne accès à l’universalité et au cosmopolitisme.

En ces temps d’orages politiques d’une grande violence, réjouissons-nous! Non pas seulement – ni vraiment – en faisant la fête dans des bars ou des boîtes de nuit. Ce serait mettre le plaisir trop haut, et la liberté trop bas! Or, selon la belle formule de Périclès : « Il n’est pas de bonheur sans liberté, ni de liberté sans courage » [8]. Et, dans les faits, il va falloir beaucoup de courage pour restaurer et le bonheur et la liberté, pour affronter et traiter les causes multiples qui affaiblissent notre démocratie : le chômage, les inégalités, le terrorisme, l’arrogance des technocrates, le mépris des politiciens, les effets de la mondialisation, le déni de démocratie…

Faut-il réunir l’équivalent des Etats généraux, comme en 1789, réinventer notre démocratie en faisant appel aux forces vives de la société civile pour ne plus avoir à confier aux seuls politiciens de métier les affaires de la Nation, ou encore instaurer le vote obligatoire (celui-ci est un devoir autant qu’un droit) ? Ces questions, et tant d’autres encore, méritent d’être soumises au débat démocratique.

En tout état de cause, à nos ennemis, ne concédons rien sur l’essentiel, à savoir la culture vivante et partagée, le débat public contradictoire, l’éducation exigeante pour tous nos enfants. Et aussi, réjouissons-nous, cultivons ensemble le plaisir de lire, d’écrire, de penser, de rire, de débattre et de communiquer !

« Si tu ne veux que s’émousse
L’acuité du regard et du sens,
Traque le soleil dans l’ombre. »[9]

C’est le « gai savoir » qui nous rendra la « grande santé », en l’occurrence la force de résister contre tous ceux qui voudraient nous détruire.


[1] Pour aller plus loin sur cette partie essentielle de la doctrine de Spinoza, je renvoie au hors-série le Point, Les Maîtres-Penseurs n°19, très complet et très accessible, consacré à Spinoza : Spinoza l’ultramoderne.
[2] Baruch Spinoza, Ethique, partie 2, prop.13 et scolie.
[3] Là où le dualisme affirme, avec Descartes notamment, l’existence de deux substances distinctes, la matière et l’esprit, comme principe d’explication du réel, le monisme  affirme, avec Spinoza, que toute la réalité renvoie à une substance fondamentale.
[4] Antonio Damasio, auteur de  Spinoza avait raison : joie et tristesse, le cerveau des émotions, Odile Jacob, 2003. Voir également le hors-série Le Point, Les Maîtres-Penseurs n°19 : Spinoza l’ultramoderne.
[5] Antonio Damasio, Hors-Série Le Point, entretien.
[6] Baruch Spinoza, Ethique (1677), partie III, prop. 11, scolie.
[7] Ibid.
[8] Périclès, stratège, orateur et homme d’Etat athénien, partisan de la démocratie (né en 495, mort en 429 av J.C.).
[9] Friedrich Nietzsche, Le Gai Savoir (1886), Plaisanterie, ruse et vengeance, A un ami de la lumière,  trad. Pierre Klossowski, éd. Christian Bourgois, coll. 10/18.

 

D. Guillon-Legeay

Professeur agrégé de philosophie, Daniel Guillon-Legeay a enseigné la philosophie en lycée durant vingt-cinq années en lycée. Il tient le blog Chemins de Philosophie. Suivre sur Twitter: @dguillonlegeay

 

 

Commentaires

Merci pour cet exposé clair et concis de certaines grandes lignes de la pensée de Spinoza.
Exposé de cette manière, Spinoza a des résonances avec la pensée de Freud.
Mais je suis, comme nous tous, je crois, un être frêle, soumise à l’irrationnel, ne serait-ce que parce que mes désirs ne suivent pas nécessairement mon intérêt, loin de là.
Sous l’ancienne cosmogonie, qui avait à voir avec l’Ancien Régime (lire Shakespeare), il était plus facile aux hommes de percevoir les liens entre leurs corps, matériels et organiques, et leurs structures sociales, politiques, et même culturelles.
Il est ironique que le point de vue scientifique, en s’appuyant sur l’objectivation d’une réalité DONNEE et non pas construite ait aggravé considérablement le divorce entre l’ordre matériel et spirituel, le visible et l’invisible, le pas localisable.
Nous sommes toujours largement soumis aux effets de ce divorce qui se fait sentir d’une manière dynamique, comme Freud l’avait pressenti. (Ce n’est pas la formation de mon fils, interne en médecine, comparée à la formation de mon père, ou mari, tous les deux médecins, qui contredirait ce constat. Nous allons très loin dans l’idéologie des pièces détachées, le Taylorisme du corps malade à l’heure actuelle.)
Une idéologie, (une cosmogonie ?) est une construction active qui exerce son influence sur tous les liens, les associations reliant les… croyances… qui la composent. (Une hypothèse n’est-elle pas une croyance ?)
C’est ce qui nous permet de « savoir » (croire ?, c’est intéressant comment le savoir et le croire dansent ensemble) certaines choses dans un/plusieurs endroit(s), et de les exprimer comme vous l’avez fait plus haut, et se comporter comme si nous ne les « savions » pas ailleurs.
Il s’agit des limites de la raison pour les pauvres créatures que nous sommes. Elle est, et sera toujours (je l’espère…) soumise aux effets du désir.
Y a t-il lieu d’être.. déprimé de constater à quel point nous sommes de pauvres créatures ? Seulement si nous tenons, à un endroit que nous refusons de voir ? à être des créatures toutes puissantes et savantes.
Pour la culture… il est fort dommage que nous ayons établi une opposition polarisante entre la culture comme produit humain artificiel, et « lanature », grande.. extérieur à nos activités.
Je vous invite à interroger l’expression « ACCES à la culture ».
Je me dis que… quand on est philosophe, on doit être en mesure d’interroger un mot qui, d’un coup, reçoit une couverture médiatique aussi importante (nous ne parlerons pas de propagande en démocratie, n’est-ce pas ?…).
Cela ne fait pas du bien aux mots, de recevoir toute cette lumière…
Un mot qui reçoit toute cette lumière est comme une pièce de monnaie, ou un billet qui, brutalement, et subitement, passe de main en main à la vitesse de la lumière.
Et, au fur et à mesure qu’il passe de main en main il… s’use.
Sa valeur, son… sens ?, progressivement, s’estompent derrière son action de rassemblement, et sa capacité de donner un sentiment d’appartenance. Et c’est à ce moment qu’il apparaît, comme le Roi devant l’enfant, nu.
C’est vieux comme le monde, cela. Et c’est aggravé par la capacité de notre technologie de rassembler les élites de la planète (entendre ici les personnes sachant lire sur un écran dont elles disposent) en un temps et une distance records.

Pour conclure comme j’aurais du le faire avant : pourquoi sommes-nous si certains de CE DONT NOUS SOUFFRONS à l’heure actuelle ? Avons-nous le bon diagnostic ?
Vous aimez Aristote ; il faudrait que je reprenne Aristophanes.
Bon rétablissement.
Petite suggestion de lecture : un roman de Saul Bellow qui interroge la fin des Lumières aux U.S. au moment de la révolution des années ’60. (Si, si, c’était une révolution.) : « La planète de Monsieur Sammler ».
Eblouissant, mais une curiosité.
Je crois que nous arrivons à la même.. conclusion ? La politesse comme valeur universelle minimum, roc sur lequel s’appuie la civilisation, et plus modestement, la vie en société. A ce titre, il y a de quoi s’inquiéter en ce moment, malheureusement…dans NOTRE nouvelle poussée révolutionnaire.

par Debra - le 17 décembre, 2015


Bonjour,

Si le corps existait et il existait – en notre future entité- bien avant : l’esprit, l’âme, la conscience ,et… les satellites cosmopolites qui gravitent autour de notre tête.

Que se passe t’il, quand son intégrité est atteinte ? Quand des tissus traumatisés, ne répondent plus aux stimulus, aux sensorialités, aux réflexes, à la pensée, coupent l’accès à la mémoire, etc…

Le corps renfermerait à lui seul et en précurseur et à l’extérieur de tout autre observation, une intelligence instinctive corrélée à la survie de son espèce. Nous avons, je crois, dépassé cet état.

On ne pourrait dénier la prépondérance, l’hégémonie du corps sur l’esprit. Le corps- base, demeure la statue fondatrice (apriorisme) et l’instigateur naturel de la dualité : corps-esprit; (onde-corpuscule)

Chacun des deux pôles seraient animés d’une évolution à contrario : le corps laïque et mortel et l’esprit voyageur dans le temps et l’espace.

Il s’agirait de s’interroger laquelle des deux dialectiques, aura pour raison, sa main-mise ?

Au reste, à son rythme, la matière du corps fidèle à ses origines, continuerait à se penser dans son fort intérieur. De même, (d’eux mêmes) le cerveau, ce continent tectonique et congruent, accomplirait une évolution parallèle.

Je dis çà, et je dis rien !

par philo'ofser - le 18 décembre, 2015


Chère Debra,

Tout d’abord, je vous remercie pour votre long commentaire ainsi que pour vos suggestions de lecture.

Ensuite, sachez que je ne suis pas certain de vous suivre dans votre propos quelque peu touffu. Aussi, sans chercher à polémiquer (je n’en ai ni l’envie, ni le temps, et encore moins la force), je vais essayer de vous répondre sur deux ou trois points.

Le rapprochement entre Spinoza et Freud est fréquent, mais hélas inexact. Spinoza ne théorise pas un inconscient psychique au sens de Freud (le mécanisme du refoulement et ce qu’il produit : le refoulé); celui-ci ne serait plutôt, à ses yeux, qu’un cas particulier de toutes les forces qui, dans l’univers tout entier, se déploient selon un déterminisme strict, et dont la conscience humaine ignore à peu près tout. De ce point de vue, l’astrophysique, la biochimie, la sociologie, l’histoire, la neurologie nous éclairent autant – sinon mieux – sur les multiples formes de ce déterminisme universel qui agit sur notre être.

S’agissant de l’accès à la culture, je crains que vous ne m’ayez mal compris. Je maintiens ma formulation, et cela pour une raison simple et évidente: tout être humain est doué de culture (sans quoi il serait un monstre): il a reçu une éducation, il possède des connaissances et des compétences acquises, des principes logiques ainsi que des valeurs éthiques (c’est le premier sens du terme, dans son acception anthropologique).

Mais lorsque la personne vient à vivre une situation d’isolement contraint (par exemple, une hospitalisation de longue durée, ou encore la vie au ralenti dans une maison de retraite), le lien social menace de se distendre voire de se rompre. Il est alors absolument nécessaire pour elle d’avoir accès à la culture, c’est-à-dire à l’ensemble des oeuvres de l’esprit qui se transmettent ou s’élaborent (c’est le second sens du concept de culture) ailleurs et à l’extérieur (les musées, les médiathèques, les salles de concert et de spectacle, les cinémas); en somme, tout ce à quoi la personne n’a précisément plus accès. Faute de pouvoir aller au-devant du monde, c’est le monde qui doit venir à elle (pour le spectacle vivant, notamment). Je maintiens que cet accès est salutaire, et les hôpitaux le savent bien: c’est pourquoi les personnels soignants organisent l’accueil de telles manifestations.

Pour conclure, laissez-moi vous rappeler que si la philosophie est, en droit, ouverte à toutes et à tous (et c’est heureux !), elle requiert néanmoins une réflexion centrée, méthodique, qui examine toutes choses avec circonspection avant de s’autoriser à affirmer quoique ce soit. Poser des affirmations et formuler des critiques est une chose; prendre le soin de les démontrer, de les fonder selon la voie de la raison en est une autre.

Respectueusement.

Daniel Guillon-Legeay

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