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Face aux «fake news», réhabilitons l’usage du conditionnel

22/01/2019 | par Alexis Feertchak | dans Art & Société | 12 commentaires

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ÉDITO : Les «fake news» poussent les journalistes à «fact-checker». Ce souci d’objectivité est un piège si l’on simplifie à outrance le réel, par nature complexe, craint le fondateur d’iPhilo, Alexis Feertchak, lui-même journaliste. Au contraire, ne faut-il pas donner toute sa place à l’incertitude, garante d’un meilleur pluralisme ?


Diplômé de Sciences Po Paris et licencié en philosophie de l’Université Paris-Sorbonne après un double cursus, Alexis Feertchak est journaliste au Figaro et rédacteur en chef d’iPhilo, qu’il a fondé en 2012. Il est par ailleurs membre fondateur du think tank de géopolitique Geopragma. Suivre sur Twitter : @Feertchak


Journaliste dans l’un de nos quotidiens nationaux, je préparais il y a quelques jours un article sur le référendum d’initiative citoyenne et, plus particulièrement, sur une question assez pointue, celle du rôle que pourrait jouer le Conseil constitutionnel si ce dispositif venait à voir le jour.

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A l’aide des maigres souvenirs de mes cours de droit constitutionnel, je m’attelais à la lecture d’articles juridiques, mais rien n’y faisait : je ne parvenais pas à comprendre un point technique – le contrôle de constitutionnalité du référendum d’initiative partagée, petit frère du RIC introduit en 2008 – qui, pourtant, était au cœur de mon sujet. J’appelais un éminent professeur de droit, mais celui-ci m’avoua avoir lui-même quelques doutes et me conseilla de demander son avis à un haut magistrat, fin connaisseur du dossier. Celui-ci m’expliqua que ces doutes étaient parfaitement fondés puisque, cette forme de référendum n’ayant jamais été appliquée, il n’était pas possible de savoir de quelle façon le Conseil constitutionnel interpréterait, le jour venu, les dispositions en question. J’étais passé en quelques minutes d’une incertitude subjective à une incertitude objective, ce qui était nettement plus rassurant. Il me suffisait dans mon article de conjuguer les verbes au conditionnel et d’expliquer à mon lecteur que, non, on ne savait pas tout.

Le conditionnel, cet absent

Et pourtant, faites l’exercice, vous verrez : le conditionnel est fort rare dans les médias. La reconnaissance d’une forme d’incertitude l’est tout autant. Une information, il faut que ce soit du béton ! De l’indicatif, vous dis-je, de l’indicatif. Cette tendance va s’accélérant au fur et à mesure que se développent les désormais célèbres «fake news» – ou tout simplement «fausses nouvelles» en français. Devant cette menace grandissante, pullulent aujourd’hui dans la sphère médiatique des «décrypteurs» chargés contre vents et marées de rétablir la vérité. Les anglo-saxons parlent à cet égard de «fact-checking». Fact : fait. Albert a mangé une pomme. C’est un fait simple. Le vérifier n’est guère compliqué. Mais prenons un autre proposition qui est aussi un fait en ce sens qu’elle est entonnée partout et a donc une influence sur le réel : «Si un Brexit dur sans accord passe, l’économie britannique s’effondrera». Courage pour le «fact-checkeur» chargé de déterminer le vrai du faux… Il faudrait en réalité que celui-ci commence en préambule par exprimer la propre incertitude voire les profonds dissensus des acteurs de la science économique en la matière, ce qui cadre mal avec l’esprit même du «fact-checking», qui veut des réponses. A l’inverse, la répétition de ce qui n’est dès lors qu’une doxa – «un Brexit sans accord sera une catastrophe» – alimentera la colère de ceux qui pensent cette proposition invalide. Parmi ces derniers, si certains pourront défendre des raisonnements censés – «pour le Royaume-Uni, les perspectives de croissance ne se trouvent pas en zone euro, mais davantage en Asie ; une indépendance commerciale retrouvée est donc une bonne chose» -, d’autres, certains d’être seuls contre tous dans la manifestation de la vérité, tomberont mécaniquement dans l’univers des «fake news».

Pour passer mes journées au téléphone avec des chercheurs – en ce qui me concerne sur des sujets le plus souvent géopolitiques – je me rends compte à quel point les certitudes sont rares face à l’actualité, le conditionnel et les adverbes de modération étant presque toujours de rigueur. Et souvent, cette incertitude fondamentale, omniprésente lors de la préparation de l’article, disparaît lors de sa rédaction. Prenons un exemple passé paradigmatique : l’élection de Donald Trump. Je me souviens des sondeurs sérieux qui répétaient à raison que les études d’opinion se situaient dans la marge d’erreur et que leur prévisibilité était encore grevée par le système complexe de l’élection présidentielle américaine. Mais rien n’y a fait : le soir de l’élection, à minuit, la plupart des chaînes de télévision annonçaient la victoire d’Hillary Clinton. La raison aurait voulu, non pas d’annoncer la victoire de Trump, mais de dire humblement : «nous ne savons pas». Ne faut-il pas parler d’une forme de «fake news» collective ?

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Prenons maintenant le traité d’Aix-la-Chapelle sur les relations entre la France et l’Allemagne. Des anonymes et des responsables politiques ont cru bon de décréter sur les réseaux sociaux que la France allait partager son siège au Conseil de sécurité de l’ONU avec l’Allemagne voire que Berlin récupérerait l’Alsace et la Lorraine. Il n’est pas besoin d’argumenter sur le fait que ces deux propositions sont rigoureusement fausses. Fake news ! On a pu alors voir plusieurs articles de presse résumer à grands trait les articles du traité. Décidément non, impossible de trouver un partage de siège onusien ou l’abandon d’une région ! Ouf, c’était gros ! Laissez passer, il n’y a rien à voir. La bataille de la vérité est gagnée, l’indicatif peut triompher.

Et pourtant non, l’indicatif ne s’impose pas si facilement lorsqu’il s’agit de commenter un traité dont la portée politique, symbolique et historique est aussi forte. Ce n’est pas parce que deux «fake news» énormes sont évidemment fausses que l’objet sur lequel elles portaient ne doit pas passer au tamis d’une analyse mesurée et prudente. Premier exemple : la présidence de la République estime que c’est l’approfondissement d’un traité historique, celui de l’Elysée. Le vent de l’histoire souffle dans le bon sens. Et pourtant, a-t-on suffisamment rappelé les prétentions françaises lors du traité de 1963 ? Il s’agissait pour De Gaulle de séparer l’Europe des Etats-Unis en s’appuyant sur le couple franco-allemand, mais cette initiative a été rendu caduque par Berlin qui a, dans un second temps, inscrit le traité de l’Elysée dans le cadre de l’OTAN. Le texte d’aujourd’hui, qui consacre encore davantage le rôle de l’alliance Atlantique, ne va donc pas, dès lors, dans le sens du texte de 1963 tel que pensé par les autorités françaises de l’époque.

De la prudence, mais pas de relativisme

Second exemple : prenons l’expression d’«Union européenne souveraine» que l’on trouve dans le préambule du traité d’Aix-la-Chapelle. L’Union européenne, qui n’est pas un Etat, serait souveraine ? Raisonnons : la France en fait partie. Or, notre constitution dispose en son article 3 que «la souveraineté nationale appartient au peuple». De souveraineté européenne, il n’est pas question dans notre Grundnorm, comme disent les Allemands. Concernant ces derniers, la Cour suprême de Karlsruhe a d’ailleurs clairement précisé à plusieurs reprises que l’Union européenne ne formait pas un ensemble national ou un peuple uni et que la nation allemande demeurait le seul fondement de la souveraineté. Dès lors, comment l’Union européenne, la France et l’Allemagne pourraient-elles être en même temps pleinement souveraines pour reprendre un adverbe présidentiel ? Il est possible de répondre à cette question dans un sens comme dans l’autre. On trouve par exemple dans les colonnes du Figaro un professeur de droit de l’Université Panthéon-Assas, Olivier Gohin, pour estimer que le traité est inconstitutionnel et nécessite la saisine du Conseil constitutionnel. Je suis sûr qu’il n’est pas difficile de trouver un professeur de droit pour dire que le texte est conforme à notre Constitution. Avec ma formation qui se limite à deux ans de droit public à Sciences Po, je ne me prononcerai pas… Mais en tant que journaliste, j’utiliserais le conditionnel, montrant par là que, non, ce traité n’est pas une évidence pour ceux qui ont raison et une abomination pour ceux qui ont tort.

Il ne s’agit pas là d’une forme de relativisme. Au contraire, que chaque citoyen se fasse en conscience une opinion tranchée sur la question. Mais respectons les règles épistémologiques élémentaires de prudence qui devraient s’imposer à toute personne dont la fonction consiste à poser des mots sur l’histoire en train de se faire. C’est toute la beauté du métier de journaliste et toute la difficulté de son exercice. Lorsque l’on a seulement quelques heures pour étudier, synthétiser et reproduire des événements économiques, politiques, juridiques qui, au-delà de leur complexité technique, représentent souvent un « fait social total » en ce sens qu’ils engagent toutes les dimensions de notre société, ne faut-il pas alors, prudemment, préférer parfois le mode du conditionnel à celui de l’indicatif ? N’est-il pas essentiel aussi, dans la mesure du possible, de toujours rapporter l’événement au contexte historique dans lequel il s’insère et qui dépasse souvent le temps médiatique ? Foncer tête baissée dans un «fait d’actualité» comme s’il n’était pas par nature d’une évidente complexité, n’est-ce pas faire fi de toute la richesse des affaires humaines ?

Assumer les limites de notre entendement

Au fond, c’est en assumant les limites de notre entendement et en précisant les contraintes épistémologiques auxquelles nous sommes confrontés que l’on parviendra peut-être à réduire le fossé grandissant entre la société et ses médias. «Je sais que je ne sais pas» vaut toujours mieux que «faisons comme si nous savions». Au contraire, «fact-checker» avec autorité voire autoritarisme sur des fondements fragiles ne revient qu’à produire des «fake news» du centre du système qui ne feront que décupler celles de ses marges. A l’inverse, c’est par une forme d’humilité assumée que l’on pourrait peut-être enrayer le colporteur de «fake news», qui, porté par une toute-puissance mortifère, cherche les certitudes de ses adversaires pour affermir les siennes. Mais il faut pour cela un journalisme à visage humain : il n’y a rien de pire qu’une information déshumanisée, froidement technique, durement procédurale, qui fait défiler ses dépêches impersonnelles sur un écran de télévision ou d’ordinateur comme si elles tombaient du ciel.

En 1955, dans Histoire et vérité, Paul Ricoeur écrivait : «Nous attendons de l’histoire une certaine objectivité (…) Est objectif ce que la pensée méthodique a élaboré, mis en ordre, compris et ce qu’elle peut ainsi faire comprendre (…) Cette attente en implique une autre : nous attendons de l’historien une certaine qualité de subjectivité, non pas une subjectivité quelconque, mais une subjectivité qui soit précisément appropriée à l’objectivité qui convient à l’histoire. Il s’agit donc d’une subjectivité impliquée, impliquée par l’objectivité attendue». Peut-être cette qualité de subjectivité vaut-elle aussi pour le journaliste qui œuvrera ainsi, en son âme et conscience, à une certaine objectivité de l’actualité.

Lire aussi : «J’aime l’incertitude en philosophie» (Adèle Van Reeth)

 

Alexis Feertchak

Journaliste, Alexis Feertchak est chef de service au Figaro, chroniqueur pour le magazine Conflits et rédacteur en chef du journal iPhilo, qu'il a fondé en 2012. Diplômé de Sciences Po Paris et licencié en philosophie de l'Université Paris-Sorbonne après un double cursus, il a été pigiste pour Philosophie Magazine et a collaboré pour l'Institut Diderot, think tank de prospective. Suivre sur Twitter : @Feertchak

 

 

Commentaires

Excellente réflexion sur un sujet d’actualité.
Petit rappel : le mot « journaliste » contient le mot « jour ».
Le métier de journaliste, à différencier du métier d’historien, est de rapporter, et commenter…l’actualité. Les.. nouvelles, quoi.
Le métier de journaliste se déroule sur fond d’éphémère. Le journaliste ne peut pas avoir le recul de l’historien, de par son objet. Cela constitue le cadre du métier, et un cadre impose des limites.

Sur l’indicatif : voici un sujet cher à mon coeur, dans le style « poule/oeuf ». On peut constater que l’indicatif est le temps du discours (qui se veut) scientifique par excellence. L’indicatif est le temps de ce qui doit obéir à l’injonction de constituer la « réalité », et il y a une vraie tyrannie de la réalité dans nos esprits. On pourrait dire à l’heure actuelle, dans une époque confite dans un matérialisme assez insidieux, que la réalité est synonyme de vérité absolue.
Hors de la réalité… point de salut, dirais-je. Pour notre époque, en tout cas.
Alors, il est intéressant de regarder l’évolution du latin sur le problème de l’indicatif. Dans le latin classique, ce qui n’est pas dans le domaine de la réalité peut être perçu sous l’angle du subjonctif, MEME LE FUTUR, avant qu’il ne soit colonisé par l’indicatif. Un futur sous le signe du subjonctif, ou sous le signe de l’indicatif n’est pas le même, (et le latin va voir apparaître, petit à petit, un futur à l’indicatif qui n’est pas… subjectif ? J’aimerais avoir les connaissances pour pouvoir en dire plus, mais je ne les ai pas, malheureusement). Je devrais dire, surtout le futur, sur lequel nous avons très peu de prise (voyons, ce n’est pas parce que nous avons les algorithmes, les sondages, les assurances, et l’édifice de la science expérimentale que nous pouvons connaître le futur avant qu’il ne se produise. Soyons un peu… RATIONNEL là, pour une fois. Qu’on regarde les entrailles des oiseaux, qu’on regarde les algorithmes, il reste, et restera une dimension d’INCERTITUDE autour de l’avenir. Heureusement.)
J’ai dit « poule/oeuf », car l’omniprésence de l’indicatif dans nos bouches façonne notre perception du monde en même temps. D’où notre pensée, notre présence au monde en… deux dimensions, et pas trois.
Ce qui est à incriminer, à mes yeux ? Notre très grand besoin de certitude à une époque où l’animal humain est soumis à une pression écrasante pour être parfait/objectif/rationnel ?. Notre besoin… de prendre la place de Dieu, place que nous avons vidée comme garde fou en nous croyant les plus forts par la même occasion. (Vous savez, dans le style, « plus fort, plus autonome, plus indépendant que moi, PLUS ABSOLU, on meurt… »)
Et, bien sûr, notre besoin tout aussi fulgurant de reléguer la fiction au rang d’un mensonge… Il faudrait écrire des livres sur ce parti pris dévastateur…

par Debra - le 23 janvier, 2019


Très bonne synthèse mais quel dommage de commencer par des anglicismes comme « fact checker » ! pour le coup, ça sonne comme une espèce de vocabulaire « boboïsant » propre à apporter de l’eau au moulin de ceux qui dénoncent le parisianisme snobinard… « vérifier les faits » en version française, mon cher monsieur : cela permet non seulement d’être lu mais aussi compris, tant sur la forme que sur le fond…

par Alex - le 23 janvier, 2019


A Debra : il conviendrait de relire Karl Kraus et ses critiques bien fondées sur le journalisme : rien a changé…

par alex - le 23 janvier, 2019


L’usage de la conjugaison… oui il faudrait y recourir bien d’avantage comme au vocabulaire adéquat et varié.

Le conditionnel est certes important pour nuancer une information mais ne suffit pas loin de là.

Il faut avant tout donner la parole à tous les avis et tous les points de vues sans les hiérarchiser et sans leur donner d’autre crédibilité que leurs sources. Sources qu’il est indispensable de toujours donner.

Il est important aussi de n’occulter aucun aspect de la problématique exposée.

Il importe aussi de distinguer l’opinion de l’information.

Lorsqu’on utilise les chiffres, il faut aussi détailler la manière dont-ils ont été construits, énoncer ceux qui les commandités et produits mais aussi donner leurs limites en expliquant les biais, les points de vues qu’ils mettent en évidence et ceux qu’ils occultent etc.

Et tout doit être vérifiable.

Bref une information juste est très complexe, fort élaborée et jamais brève.

En dehors de cela une information ne peut jamais être vraie. Il faut donc le savoir et les censeurs donneurs de leçon qui s’arroge l’autorité de dire ce qui est une fake news de commencer par reconnaitre que leurs propres infos sont fausses puisque incomplètes.

par Olivier MONTULET - le 23 janvier, 2019


La seule information juste (qui n’est pas une fake news) est une information qu’on a élaborée pour soi-même à partir de nombreuses sources diversifiées que l’on a croisée et qu’on admet comme n’étant pas définitivement figée.
Il ne faut pas croire que l’on puisse trouver une information juste quelque part. Toute information est construite donc viciée.
Lutter contre les fake news c’est permettre la libre circulation de toutes les opinions, de ne jamais dire ce qui est juste et à fortiori ce qui est faut et éduquer les gens à croiser, analyser les informations mais aussi de les critiquer.
Dire ce qui est une fake news et ce qui ne le serait pas c’est infantiliser le citoyens mais c’est aussi profondément autoritaire et anti-démocratique.
Les idées se combattent par des idées et le débat. La censure, sous quelque forme ou motivation qu’elle soit, est toujours et absolument toujours anti-démocratique.

par Olivier MONTULET - le 23 janvier, 2019


Et on peut ajouter, qu’il est aisé de passer de l’indicatif surtout si l’indication est simple ou simpliste à l’impératif.
« Tu pourrais penser ceci ou cela ; tu penses ceci ou cela ; tu dois penser ceci et non cela : tu vas penser ceci contre cela »

par Juffé - le 25 janvier, 2019


Merci, cher Alexis Feertchak, pour votre subtile analyse . Permettez-moi de vous soumettre un sujet de réflexion : la profession n’aurait-elle pas intérêt à développer au maximum cette nouvelle pratique du métier qu’il est convenu d’appeler le  » journalisme de solutions  » ? Le public, me semble-t-il, est souvent lassé que les journalistes se contentent de relater ce qui ne va pas. Pousser plus loin le métier, en interrogeant tous ceux qui apportent – ou prétendent apporter – des solutions à un problème, ne serait-ce pas une piste à suivre pour ramener à la presse écrite des lecteurs qui la désertent, pour s’informer uniquement sur internet où l’on peut, bien sûr, trouver tout…et n’importe quoi ? En la matière, la presse généraliste n’aurait-elle pas intérêt à s’inspirer des bonnes pratiques d’une branche du métier pour laquelle elle éprouve pas mal de condescendance : la presse professionnelle ? Ayant pratiqué les deux ( 25 ans dans la première, 15 ans dans la deuxième ), ayant également enseigné le métier, je peux en témoigner : il y a une rigueur dans la presse professionnelle dont beaucoup devraient s’inspirer ! Pour une raison simple : vos lecteurs sont des pros du secteur que vous couvrez et si vous leur balancez une approximation ou, pire, un grossier contresens, une contre-vérité, ils décrocheront leur téléphone pour la rectifier…avec bienveillance ou pas ! Dans cette presse, le croisement des sources , la vérification obstinée des faits, constituent vraiment la base du métier. Si un industriel vous dit  » Je suis leader de mon marché « , vous allez vérifier sur un panel ACNielsen , ou Secodip, ou GFK …et constater peut-être qu’il est certes leader d’un segment du marché , mais que ce dernier est loin d’être dominant sur le dit marché ! Bon, on est loin du conditionnel. Mais je crois qu’il n’y a pour la presse écrite qu’une sortie par le haut possible : une partie des lecteurs acceptera toujours de payer le prix d’un journalisme de qualité…mais aura de plus en plus d’exigences en ce qui concerne cette qualité.

par Philippe Le Corroller - le 26 janvier, 2019


Merci, Alexis, pour cet excellent article et sa superbe conclusion. Ma grande crainte sur le sujet de la vérité et des façons de l’énoncer est que le monde (les « gens » que nous sommes tous) perdant de plus en plus ses « raisons d’espérer », succombe pleinement au seul désir de croire. C’est là, je pense, le principal ressort des fausses nouvelles : « Je veux croire ceci, indépendamment des faits », « Je veux croire cela, donc c’est la vérité. » En somme, prendre ses désirs pour des réalités. Face à cette puissance quasi pulsionnelle, je crains que même la meilleure déontologie journalistique ne soit pas de taille… et pourtant, elle est absolument nécessaire ! C’est qu’elle a besoin d’alliés. Le principal étant probablement l’éducation.

par Julien De Sanctis - le 2 février, 2019


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