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Connaissez-vous le paradoxe du tas ?

29/07/2017 | par Robert Zimmer | dans Classiques iPhilo | 17 commentaires

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A VOUS DE JOUER – Nous continuons notre série d’été qui durera jusqu’à la fin du mois d’août. Découvrez et répondez aux exercices et autres tests extraits de l’ouvrage Petites distractions philosophiques du philosophe allemand Robert Zimmer, qui vient d’être publié par la Librairie Vuibert. Cette semaine, le déroutant paradoxe du tas !


Robert Zimmer est un philosophe et essayiste allemand né en 1953, auteur d’une thèse de doctorat en Philosophie sur Edmund Burke et de biographies et d’introductions à la philosophie particulièrement populaires outre-Rhin. Une partie de son oeuvre est traduite en français, notamment Le Grand Livre des philosophes (éd. Fayard, 2012) et Petites distractions philosophiques (éd. Vuibert, 2017).


Enoncé

Une pile de dix mille grains est un tas. Il existe un nombre n supérieur à 1 tel que, si une pile de n grains est un tas, alors une pile de n moins un grain est également un tas. ➞ Un grain est donc un tas.

➦  Avons-nous ou non, avec les propositions suivantes, un syllogisme valide ?

Merci pour vos réponses en commentaires. Et voici celle de Robert Zimmer !

La formalisation proposée n’est qu’une possibilité de représenter le célèbre «paradoxe du tas», qui nous vient de l’Antiquité. Il s’agit tout d’abord de la question: quand un tas est-il un tas, et quand cesse-t-il d’en être un ? À un niveau plus général, il s’agit de traiter de quantités n’ayant pas à être définies exactement.

Ce qui est clair, c’est que la première prémisse est vraie: 10.000 grains constituent bien un tas (on aurait pu aussi bien choisir n’importe quel autre grand chiffre). Il est tout aussi clair que la déduction est fausse: un grain isolé n’est pas un tas. L’erreur doit donc se nicher dans la prémisse 2.

Il existe en l’occurrence plusieurs modes d’approche pour identifier cette erreur. Nous choisissons celui du «degré de vérité». Un «tas» n’est pas précisément quantifiable en soi. Il existe bien néanmoins des
amoncellements de grains que l’on peut, plus que d’autres, présenter comme des tas. 10.000 grains moins 1 constituent, en tout cas, encore un tas. De même, 9 999 grains moins 1 100 pourraient sans doute encore en être un. Cinquante grains ? On doute déjà. Mais dix grains ne peuvent plus l’être. Ce qui signifie ceci : plus nous enlevons de grains, moins il peut s’agir d’un tas, et moins s’avère convaincante la prémisse 2, dont le degré de vérité va en s’amenuisant considérablement. La prémisse 2 ne peut donc toujours se prévaloir du même degré de vérité, jusqu’à se révéler à un moment définitivement fausse. Pour cette raison même, le syllogisme a aussi une conclusion erronée.

Lire aussi – « La philosophie est une gymnastique » (Robert Zimmer)

 

Robert Zimmer

Robert Zimmer est un philosophe et essayiste allemand né en 1953, auteur d'une thèse de doctorat en Philosophie sur Edmund Burke et de biographies et d'introductions à la philosophie particulièrement populaires outre-Rhin. Une partie de son oeuvre est traduite en français, notamment Le Grand Livre des philosophes (éd. Fayard, 2012) et Petites distractions philosophiques (éd. Vuibert, 2017).