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Du citoyen d’Athènes à la citoyenne du village planétaire : l’école, la transmission, la loi

6/04/2016 | par Elizabeth Antébi | dans Art & Société | 3 commentaires

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Le journal iPhilo soutient ardemment l’apprentissage des langues anciennes, notamment le latin et le grec. Comment prétendre philosopher demain si nous renonçons à connaître nos racines qui irriguent encore tant nos propres langues, à commencer par le français ? C’est donc avec un grand plaisir que nous publions aujourd’hui le discours d’ouverture du 10ème Festival Latin Grec qui s’est tenu à Lyon du 24 au 26 mars 2016 sur le thème « Nous autres Citoyens ». Il a été prononcé par Elizabeth Antébi, fondatrice et présidente d’honneur du Festival, chroniqueuse pour iPhilo depuis 2012.

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ous vivons une mutation non pas de passage d’un siècle à l’autre, mais d’un millénaire à l’autre. Que va devenir le citoyen à l’heure où le premier passeport cyborg vient d’être accordé en Hollande à un artiste qui ne voyait pas les couleurs et qui, grâce à un implant, les « entend » désormais ? Il raconte comment son cerveau s’en est retrouvé modifié.

Rappelons que nous vivons le temps de drones, des voitures sans chauffeur, des systèmes de guidage, des nanotechnologies  dans le domaine de la physique, mais aussi, dans celui de la biologie et de la biotechnologie, le temps des puces et des clones dont on ne sait ce que pourra bien être leur mémoire et leur degré de liberté. Et que tout cela a déjà commencé à modifier le cerveau et les méthodes d’apprentissage de deux générations dans nos pays dits développés. Les enfants sont des mutants, comment donc opérer la transmission et que voulons/pouvons-nous transmettre ?

C’est un sujet qui me passionne mais qui nous entraînerait trop loin. Si j’en parle, c’est pour poser le problème de la mémoire – « l’inspiration c’est la mémoire » disait comme vous savez Dostoïveski – qui ne se réduit pas aux données du cloud ou nuage virtuel engrangeant ces données.

Si l’on désire rester humains et ne pas entrer dans l’univers des technoïdes, la réflexion, l’esprit critique, la prise de distance sont des conditions sine qua non, apportées par ce qu’au siècle dernier on appelait l’humanisme et les Humanités.

Rappelons que le père de la cybernétique – c’est-à-dire de cette science qui nous gouverne tous aujourd’hui, à base d’ interaction entre communication et poste de commandement –  Norbert Wiener récitait L’Odyssée en grec ancien et que le nom même de cybernétique vient du mot grec qui signifie pilote ou timonier. Le cyb(ernétique)org(anisme) est donc cet « homme » nouveau ou plutôt en transition,  fusion de l’être organique et de la machine. Des cabinets d’avocats réunis dans le groupe Lexing s’occupent d’ailleurs d’établir la charte des droits et devoirs des robots [sic] qui grâce aux progrès de l’intelligence artificielle sont déjà, vous le savez, capables d’écrire des articles de journal ou de triompher de l’homme au jeu de Go. Bienvenue au troisième Millénaire.

Bref nous allons passer du citoyen stricto sensu au cyber-citoyen manipulé par puces et palpeurs par des tyrans obscurs … et les femmes dans tout ça ? Eh bien il y a une dame qui a vaticiné sur le sujet , une Américaine bien entendu, qui a titré son article “plutôt cyborg que déesse”. Ca se discute. Je l’enverrai à qui me le demandera.

Mais comment tout cela a-t-il commencé ?

La femme dans la cité

Les Athéniens, puis les Romains sont à l’origine de plusieurs de nos notions actuelles tant débattues, la république à laquelle on accole désormais toujours le terme de valeurs,  le civisme qu’on appelle aujourd’hui comportement citoyen – faisant dans la novlangue qui nous gouverne (ou noie le poisson) d’un nom un adjectif, ou d’un verbe un nom avec le fameux « vivre ensemble ».

La femme dans le monde gréco-romain n’est pas citoyenne, mais elle n’en tient pas moins une place importante, et pas seulement comme mère ou épouse. Elle peut exercer un métier – la mère de Socrate est accoucheuse, Cleito la mère d’Euripide marchande de quatre saisons -, inspirer des lois comme la métèque Aspasie originaire de Syrie et qui tenait salon à Athènes, être une conseillère respectée comme la tante de Sénèque. Platon reste ambigu sur le rôle des femmes dans  Les Lois et La République; ce qu’on ne lui conteste pas c’est  la gestion de l’espace privé, l’oikos et c’est sans doute par le « panier de la ménagère » qu’a commencé la vision masculine d’une cité bien administrée, puisque le mot économie vient de là. Et ce n’est pas dépourvu de sens puisque dans son livre Richesse et Pauvreté des nations l’économiste David Landes a établi que mieux les femmes sont traités, plus la nation est prospère.

Faute de temps, je passerai rapidement sur le fait que l’on parle « la langue maternelle » alors que la « patrie » est la terre, réelle ou supposée, du père. Je vous laisserai y réfléchir.

Je ne ferai aussi qu’une brève allusion à ces premières « citoyennes » qui s’emparent du Parlement dans L’Assemblée des Femmes,  oeuvre d’Aristophane, l’ancêtre de nos humoristes. Ou de ces Kenyanes qui ont repris le mot d’ordre de son héroïne de voilà vingt-cinq siècles dans Lysistrata, appelant à la grève du sexe tant que les hommes continueront la guerre. C’est dire si tout cela est bien vivant aujourd’hui !

Quant au monde romain, on pourrait lui trouver, concernant les femmes, des similitudes avec des codes de la famille de certaines traditions d’aujourd’hui. Car la femme est soumise au pater familias. Même si elles peuvent se promener à travers la ville, assister à des spectacles et se montrer plus libre qu’il ne faudrait selon le poète Juvénal qui leur consacre une satire.

Comme chacun sait, tout le monde à Athènes n’est pas citoyen, il ne faut pas être esclave, femme ou étranger ce qui va vite puisque il est indispensable de naître de père et de mère athéniens. On est donc citoyen ou Politès au sens strict du périmètre de la cité ou Polis. Et le citoyen, Politès est à l’origine de la politique, comme le cives est à l’origine du sens civique. Le mieux étant l’ennemi du bien, l’abondance des citoyens (500 tirés au sort chaque année) qui participent à l’Assemblée et peuvent proposer des lois qu’on vote à main levée a fait rapidement glisser la démocratie vers la démagogie. Mais c’est une autre histoire.

L’apparition de la citoyenne

« La femme a droit de monter sur l’échafaud; elle doit avoir également celui de monter à la tribune», c’est ce que déclare Olympe de Gouges la première à rédiger en 1791  une Déclaration des Droits de la femme. Elle sera guillotinée le 3 novembre 1793, cinq jours avant Madame Roland.  Car si la Déclaration des Droits de l’Homme de 1793 a précisé celle de 1789 en introduisant la notion d’une « égalité naturelle » entre les hommes et en proclamant le droit à l’instruction, point de mention des femmes. Et quand on traite une femme de « citoyenne », il s’agit de Marie-Antoinette et des femmes dont la tête va rouler sous l’échafaud ou trôner au bout d’une pique. Les termes de « citoyen » ou « citoyenne » sont là pour rappeler aux bourgeois qu’ils ne sont rien que des rouages de la cité.

Pour Rousseau puis Robespierre, la victoire finale de Sparte sur Athènes à la fin de la guerre du Péloponnèse est celle des pauvres et vertueux sur les riches et pervers, des ascètes sur les commerçants.  « Le bonheur est une idée neuve en Europe », écrit Saint-Just même s’il est nécessaire d’imposer le bonheur ou la vertu par la terreur,  comme le défend Robespierre.

L’école et la transmission 

L’école se dit en grec ancien comme en latin scholè, ludus – l’art de disposer du temps ; espace préservé à l’intérieur de la cité où l’on se soustrait à la pression du monde extérieur pour apprendre et réfléchir, se consacrer au jeu de l’esprit,  à l’otium  par opposition au negotium. Il s’agit de former l’esprit du futur citoyen, en particulier son sens critique. Ce que Jacqueline de Romilly traduisait par « Nous allons au plus rapide, les Grecs, eux, allaient au plus profond ».

Et rappelons la phrase d’Isocrate (436-338), celui qui aurait créé le terme de « philosophie »  :

ΕΛΛΗΝΕΣ ΚΑΛΟΥΝΤΑΙ ΟΙ ΤΗΣ ΠΑΙΔΕΥΣΕΩΣ ΤΗΣ ΗΜΕΤΕΡΑΣ ΜΕΤΕΧΟΝΤΕΣ
« On appelle Grecs ceux qui participent à notre culture » (Isocrate, Panégyrique, IV 48)

Cela c’est la tradition que l’on appelle humaniste.

Mais il en est une autre, héritée de la Révolution française et de la Terreur : vision d’une école étroitement liée à l’éducation et non plus seulement à l’instruction, destinée à forger le citoyen vertueux – et la vertu s’entend ici au sens politique. Au passage, soulignons que le mot vertu vient de vir l’homme viril . Cette deuxième vision de l’école bannit tout ce qui est jugé « inutile », émollient. Ce qui nous rappelle quelque chose.  Si l’école de Jules Ferry s’inspirera d’une Athènes rêvée, celle de la réforme actuelle, najatienne se réfère à une Sparte ré-interprétée, dans le sens de la formation de citoyens quasi-pavloviens. Soumission à la loi, dévotion à la patrie, la régénération du citoyen grâce à l’éducation – prémisses de la ré-éducation soviétique ; dans cette perspective, les femmes doivent entretenir des vertus sportives et quasi-militaires pour envoyer à la guerre de bons soldats. Robespierre comme Lycurgue veut régénérer l’homme, en faire un être conduit par la vertu, entièrement tourné vers l’État. Le terme de « régénérer » sera d’ailleurs repris par le gouvernement de la IIIème République pour ses colonies. Le citoyen a une mission, celle d’éduquer les âmes selon son credo :

« Ô femmes françaises, chérissez la liberté achetée au prix de leur sang ; servez-vous de votre empire pour étendre celui de la vertu républicaine ! […] Qu’avez-vous à envier aux femmes de Sparte ? Comme elles, vous avez donné le jour à des héros ; comme elles, vous les avez dévoués, avec un abandon sublime, à la patrie ».

Saint-Just écrit : « Le monde est vide depuis les Romains », car plus encore que Sparte, le modèle est Rome. Robespierre était baptisé « le Romain » par ses professeurs de Louis-le-Grand. Il sera traité de Sylla par Tallien le 9 Thermidor. Brutus est sans cesse cité et représenté. En Aquitaine, le Capbreton est rebaptisé Capbrutus. Consulat, Sénat, Tribunat, empire, senatus-consulte, préfet, code, tout cela vient des Romains. Et cela continuera sous Napoléon. La colonne de la place Vendôme évoque la colonne trajane, sans parler de l’Arc de Triomphe. Les symboles « antiques » pullulent : bonnets phrygiens des esclaves affranchis, faisceau des licteurs, temple de la déesse Raison.

Comme vous le savez de la citoyenne aux suffragettes, les femmes n’accèderont en France à l’enseignement qu’avec la loi Camille Sée de 1882 et ne pourront voter en Europe qu’au XXème siècle..

Le village planétaire

Rousseau rappelle que le citoyen ne se cantonne pas à une périphérie géographique, d’une réduction à la cité, mais qu’il s’agit  d’un état d’esprit. Il entrevoit aussi la difficulté de réguler les moeurs dans une cité trop vaste : « L’étendue des Etats n’est pas indifférente aux moeurs des citoyens ». Qu’eût-il dit de la globalisation ?

Ce sont les Stoïciens qui ont les premiers évoqué le citoyen du monde, le cosmopolite, chaque personne étant maître de son destin. Et le monde – alors très limité ! – est conçu comme la cité véritable. Diogène répond à un Athénien qui l’interroge sur son origine : « Je suis citoyen du monde » (Diogène Laërce, Vies et Doctrines des philosophes illustres, VI, 63). « Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger. » Homo sum ; humani nihil a me alienum puto dira par la suite Térence, et cette idée par la suite fait son chemin ne distinguant pas théoriquement celui qui défend sa cité et l’ennemi qui veut la détruire : tous ne sont-ils pas des hommes ? Idée totalement opposée à la vision que se fait Athènes de la démocratie : Périclès n’est-il pas avant tout stratège ? Et Robespierre ne cesse de parler de la patrie à défendre, fût-ce par la terreur. 

Chez les citoyens de la Mitteleuropa, déchirée entre tant de nationalités, on se proclamait cosmopolite. Entrait encore dans ce mot l’émerveillement cosmique – le mot rappelons-le, signifie bijou, parure. Du cosmos au « village global » créé par la télévision selon le sociologue Marshall Mc Luhan qui n’avait pas encore connu la réalité virtuelle ou augmentée, et du « village global » à la globalisation planétaire qu’est devenu le citoyen dématérialisé ou au contraire englué dans la matière ? « Il y a 2 000 ans, la plus grande marque d’orgueil était de dire civis romanus sum (« je suis citoyen romain »). Aujourd’hui, dans le monde libre, la plus grande marque d’orgueil est de dire Ich bin ein Berliner. » déclare Kennedy à Berlin (1962). Ancêtre du « Je suis Charlie ».

La globalisation n’a-t-elle pas créé les non-citoyens, les « hors cité » ? A  la phrase de Marx « La propriété c’est le vol » a succédé l’idée que la terre appartient à tout le monde – no border, c’est-à-dire « sans frontières ». Les cités ne font plus qu’une seule cité : c’est le squat urbi et orbi. Dans ce monde sans limite inspiré du virtuel, avec ses réseaux, ses « liens », ses « amis » et ses « j’aime » globalisés, la toge le cède aux armes. Or, comme le rappelait Thucydide, la loi de puis la cité antique est là pour protéger les faibles : « Qu’est-ce qui fait leur force ? Vous-mêmes, à condition de les fortifier et de mettre, en toute occasion, leur puissance souveraine au service de l’homme qui les réclame. » Le mot de police ne vient-il pas de Politeia? Dans un monde global qui va proclamer la loi ? Qui va préserver l’individualité du citoyen, condition sine qua non de la démocratie ? Rappelons la phrase du comte de Clermont-Tonnerre quand on parle d’accorder la citoyenneté aux juifs : « Il faut tout refuser aux juifs comme nation ; il faut tout leur accorder comme individus ; il faut qu’ils soient citoyens ». Car le citoyen – et c’est essentiel – se définit comme citoyen libre de ses choix, de ses votes, non au sein d’une communauté.

Pro domo

C’est l’école qui m’a appris, par la langue, la culture, la discipline à devenir citoyenne. On ne naît pas citoyen, on le devient, et l’école doit éduquer, c’est-à-dire conduire l’enfant (« pédagogie ») sur un chemin où il sera « en bonne voie » comme on dit, pour poursuivre sa vie, avec tous les paris nouveaux à relever. Plus que jamais les petites filles qui veulent accéder aux droits et aux devoirs de citoyens dans le monde entier sont en danger d’être tuées ou défigurées rien que parce qu’elles veulent aller à l’école. Dans nos pays même, si modernes, il est des lieux et des écoles où on les agresse, les moleste, où elles ne sont pas « l’avenir de l’homme » comme disait le poète. Eh bien c’est à celles-là que je dédie ce petit parcours autour de la citoyenneté, et à toutes ces jeunes femmes qui sont au fond la jauge du degré d’évolution ou d’involution d’un pays dans le domaine de la citoyenneté.

 

Elizabeth Antébi

Docteur en histoire des sciences religieuses (EPHE), universitaire, journaliste, Elizabeth Antébi a publié une dizaine de livres et a réalisé plusieurs téléfilms. Fondatrice du Festival Européen Latin Grec qui en est en mars 2015 à sa 10ème édition (www.festival-latin-grec.eu), elle a enseigné le latin au Lycée Français de Düsseldorf, où elle vit et tient une chronique hebdomadaire, "Le Génie de la Langue", dans le Petit Journal.com. Vous pouvez retrouver plus de détails sur son blog personnel http://associationfortunajuvat.wordpress.fr.

 

 

Commentaires

Bonjour,

Oui, Madame,vous parlez d’un sujet brûlant et du silence sidéré. Soyez en remercié. Vous êtes parmi les lanceurs d’alertes -tant décriés- qui tirent sur la sonnette d’alarme.

Nous ne le dirons jamais assez,
Tant l’avenir est hypothéqué;
Des mots désuets, versus, des
Particules nanoprothésées

Pendant que notre inertie se nourrit d’illusions, notre avenir, celui de l’humanité toute entière, se joue dans les murs blancs de l’antimatière; celui d’un autre monde qu’on nous impose; pernicieusement.

Pourrait-on exprimer, qu’une guerre acharnée des mots, occupe l’espace médiatique de l’info et de l’image chronophages. Le pessimisme transpirant est affligeant, omniprésent. Le meilleur de l’existence est étouffé, ringardisé, démodé, invendu.

La mémoire, de plus en plus vite, est compressée dans des disques durs. Celle de nos cerveaux, encore humaine, est soumise à un bourrage effréné; pour lentement et inexorablement; dégénérer.

Au point que la femme contemporaine est mise encore au piloris, au sens d’une réalité qui voit la famille exploser. Seule face à l’isolement. Que se passe t’il donc dans nos sociétés, qui profiterait au renversement de valeurs.

Vers où, ou quoi, et comment, ce fatras, va t’il aboutir ?

par philo'ofser - le 7 avril, 2016


Je trouve beaucoup de belles choses à lire ci-dessus, bien que je ne partage pas les convictions de Madame Antébi.
Sur l’Homme « augmenté » par la technologie, je la renvois, ainsi que d’autres lecteurs, au très beau témoignage de Jacques Lusseyran dans « Et la lumière fut » où ce dernier parle de comment il a pu voir de nouveau après avoir été aveuglé dans un accident à l’âge de 9 ans.
M. Lusseyran n’avait pas de puces pour le réparer du préjudice qu’il a subi à la suite de cet accident. Il a appris à voir autrement, et moi, ayant mes deux yeux, je serais diablement heureuse de pouvoir voir comme M. Lusseyran a vu. Pour une augmentation, une réparation, c’en était un. Mais certainement pas la même que prévoit notre civilisation à l’heure actuelle. Nous… nous mettons notre foi dans la réparation par l’intermédiaire de nos créations techniques.. prométhéens…destinées à nous faire miroiter que nous sommes les maîtres de nos destins, alors qu’un peu de.. bon sens ? observation ? nous contraint à constater combien nous ne sommes PAS les maîtres de nos destins.
Il est dangereux par la même occasion de s’attacher autant à un clivage idéologique entre « forts » et « faibles », et l’exemple de Jacques Lusseyran peut en témoigner encore une fois.
Dans de sempiternelles discussions de salon, nous croyons trop facilement pouvoir identifier les faibles, et nous refusons de voir à quel point les solutions que nous préconisons pour les réparer de leur « faiblesse » (quand le désir sous entendu n’est pas de les éliminer purement et simplement…) sont autant de tentatives/tentations de nous sentir nous-mêmes puissants/forts de notre capacité de les « aider », parfois malgré et contre eux. Et encore une fois, certains des « faibles » peuvent bien nous rendre manifeste… pour le meilleur ET le pire, combien leurs faiblesses sont des forces implacables. N’est pas Jacques Lusseyran qui veut.
Nous avons les moyens de le savoir SI nous voulons aller au delà des discussions de salon, dans les lieux physiques ou virtuels, d’ailleurs.
Pour le statut des femmes, et l’école…
Cela fait un certain temps en Occident que nous refusons de supporter une autre vision du statut de la femme que la nôtre.
Et notre très grande intolérance génère beaucoup de tensions dans un monde qui n’est pas si mondialisé que cela, compte tenu que les élites occidentalisés du monde ne représentent pas tous.
Que la Femme puisse être multiple, cela me semble désirable.
Mais je constate que pour ma civilisation, cela est devenu impensable, et je le regrette amèrement.
Contrairement à ce qu’on nous dit, l’école n’est pas le seul lieu où un être humain, garçon ou fille, peut apprendre, et il est peut-être souhaitable que toutes les personnes n’aient pas les mêmes savoirs, glanés dans les mêmes livres, dans les mêmes lieux.
Trop de concentration (du savoir) dans des lieux uniques tue la curiosité, le désir d’apprendre, à tout âge, d’ailleurs.
Cela finit par nuire sérieusement à la transmission des savoirs qui ne sont pas concentrés dans ce lieu.. idéalisé qu’est l’école…
Et pour ma part, j’estime que le monde s’appauvrit avec une trop grande… hégémonie de l’idée de l’école dans les esprits.
C’est curieux, mais vous savez, on peut être une personne très intelligente, avec un esprit cultivé, et un savoir encyclopédique, même, sans savoir lire et écrire. Par le biais de la transmission… orale…
A méditer, à mon avis.
Pour le salut de notre mémoire…

par Debra - le 7 avril, 2016


tout en remarquant que « cybernetikos » est ce navigateur qui vogue selon un nouveau mode de navigation : la philosophie, cette nouvelle manière de voir/penser/concevoir systématisée par Platon et qu’il nommera : hypothesis…cette « seconde navigation » dont nous sommes tributaires, y compris jusqu’aux formes les plus élaborées de la virtualité et du numérique et que les thuriféraires de ceux-ci, ont oublié/escamoté/occulté en hypostasiant plutôt qu’en hypothésiant….

par Gilbert Kirouac - le 8 avril, 2016



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