ANALYSE : En 50 ans, la consommation par personne a triplé. Le problème est qu’aujourd’hui, personne n’accepte de ne pas disposer d’une multitude de biens et de services qui auraient paru être un luxe à une époque antérieure. Or, un «pouvoir d’achat» plus élevé est parfaitement compatible avec une «qualité de vie» médiocre ou indigente. Et de cela il n’est presque pas question dans les discours des candidats à l’élection présidentielle d’avril 2022.
L’Édito : «Décroissance heureuse à l’horizon ?»
LA LETTRE D’IPHILO #6 : Recevez chaque mois dans votre boîte «mail» une lettre écrite par notre rédaction. En plus d’une sélection d’articles – ici ceux parus en février mais aussi certains «classiques» à (re)lire – vous pouvez découvrir «L’Édito», un court billet en lien plus ou moins étroit avec l’actualité
Le philosophe n’est pas là pour donner des leçons de management !
BONNES FEUILLES : Le manager peut en revanche réveiller le philosophe qui sommeille lui. C'est le propre de la philosophie de conceptualiser des arts, des sciences et des techniques qui ne sont pas elles. Alors pourquoi pas avec le management, qui régit une grande partie de nos vies ?
L’esprit malin du capitalisme
ANALYSE : L'économiste publie un essai stimulant dans lequel il inverse le sens de causalité que Max Weber établit entre le capitalisme et son esprit. L'individualisme néolibéral est le produit du capitalisme spéculatif plus que sa cause.
Les subtils et les crustacés
BILLET : Autour d'une variation inspirée par André Gide, l'ingénieur et philosophe des sciences estime que l'intelligence est subtile quand elle est la fille du principe de rationalité limitée. L'environnement est toujours incertain, il faut vivre avec, ce que ne comprennent pas les crustacés.
Xavier Pavie : «Derrière l’innovation, une volonté de transcendance»
ENTRETIEN : Dans "Philosophie de l’innovation" chez PUF, le philosophe de l'ESSEC étudie cette force de changement qui vient de l’homme tout en cherchant à le dépasser. Mais il se veut résolument optimiste : oui, il est possible d’arrêter une innovation jugée nuisible pour la société.
Pourquoi le goût du pouvoir rend-il impuissant ?
CHRONIQUE : Le pouvoir est nécessaire dans les organisations humaines, mais a le défaut d'être à la fois remède et poison, ce que les Grecs appelaient un pharmakon. Pour Eric Delassus, le point de basculement réside dans la nature désir du manager, selon qu'il souhaite - ou non - contribuer à la puissance d'agir de ses subordonnés.
BILLET : Le documentaire La gueule de l'emploi, sorti en avril dernier, montre un management impitoyable et humiliant renvoyant les hommes à une sorte d'état de nature. Eric Delassus révèle les processus d'habitude et d'irresponsabilité individuelle à l'œuvre dans ces situations professionnelles, comparant les cadres de recrutement à ce qui semble être une nouvelle "banalité du mal".
Luther, la société et le marché
CHRONIQUE : La religion protestante fête aujourd'hui ses 500 ans. À contre-courant de la thèse wébérienne d'un protestantisme annonçant la société de marché, les valeurs chrétiennes fondent, chez Martin Luther, une critique précoce de la logique marchande.
L’économie est-elle une science ?
ANALYSE : Question épistémologique par excellence, celle de la scientificité d’une discipline prend une dimension particulière avec l’économie, tant son poids dans la société humaine et parmi ses dirigeants est lourd. Jacques Sapir part du consensus méthodologique inquiétant qui existe dans la recherche pour remonter à Karl Popper, dont le « falsificationnisme » est largement inopérant quand […]
Le management : une question philosophique
ANALYSE : En raison d’une méconnaissance réciproque, la philosophie et le management n’ont pas toujours fait bon ménage. Mais, au lieu de réduire le management à la transmission et l’application mécanique de procès dont la teneur éthique est parfois discutable, il semble préférable d’en faire un objet de réflexion.
Stratégie et entreprise : fallait-il brûler tout Marx ?
ANALYSE : Avant d’être l’inspirateur d’un système politique adoré puis honni, Marx fut un des plus grands économistes du XIXe siècle. Le discrédit dans lequel il est tombé nous rend sourds à certaines de ses leçons qui peuvent nous aider à comprendre les problèmes stratégiques de entreprises aujourd’hui.
Monde du travail : prendre en considération la vulnérabilité
ANALYSE : le problème dans le monde du travail, c’est que le désir de l’employé, du salarié est soumis à un « désir maître », celui du chef d’entreprise ou du supérieur hiérarchique. Introduire l’éthique du care dans le monde du travail, prendre en compte sa propre vulnérabilité et celle d’autrui, n’y a-t-il pas là une voie pour tenter de sortir des rapports de servitude que génère encore trop souvent l’organisation du travail ?
La philosophie au secours du Management
TRIBUNE : Pour Patrick Errard, le management a besoin de la philosophie pour répondre aux grandes questions posées aujourd'hui par la gestion et les ressources humaines dans les entreprises.
ANALYSE : On l’aura compris, la France a aujourd’hui, plus que jamais, besoin de réformes. Comprendre : la France doit changer pour s’améliorer. une des réformes (amélioration) de première importance pourrait bien être celle du passage à un discours bassement politicien à un discours politique intellectuellement et moralement régénéré ; car si les mots sont désormais synonyme de « blabla », c’est que leur déconnexion avec la réalité et les actes est soigneusement cultivée à des fins instrumentales.
Michael Sandel : Ce que l’argent ne saurait acheter
BONNES FEUILLES : Jean-Pierre Dupuy a écrit la préface de Ce que l’argent ne saurait acheter, traduction française du livre du grand philosophe américain Michael Sandel, parue en 2014. Nous reproduisons cette préface avec l’aimable autorisation de son auteur et celle des éditions du Seuil.
L’avenir du travail
TRIBUNE : Le paradoxe est là : on ne cesse de nous entretenir de la valeur-travail, qui ne cesserait de se dégrader, mais, en même temps, on nous propose comme seul horizon politique de considérer le travail comme un coût, qu’il faudrait absolument réduire pour gagner la bataille de la compétitivité.
La philosophie à la source de l’innovation
ANALYSE : En apparence moins ambitieuse que la notion de progrès, l’innovation représente une croisée des chemins pour l’Homme du XXIe siècle. Quel que soit le schéma d’évolution technique retenu, un monde sera engagé et avec lui une définition de l’humain. Le défi à venir est de parvenir à doter l’innovation d’une éthique, d’un cadre normatif (donc d’un projet) à la fois souple et attentif aux erreurs du passé.
Rejeter le libéralisme ?
ANALYSE : Le libéralisme est devenu une idéologie qui nie ses propres principes et en particulier le libre développement du plus grand nombre. C’est à l’évidence le cas du neo-libéralisme qui prône la liberté complète des capitaux et des marchés financiers, mais aussi le libre-échange intégral.
Un bonheur sans croissance est-il possible ?
« On ne tombe pas amoureux d’un taux de croissance », lisait-on sur les murs de Paris en mai 68, signifiant par là l’absence de communauté de sens et de corrélation nécessaire entre l’augmentation, quantitative, de la richesse nationale et la recherche, qualitative, de bonheur personnel.
Quand valeur économique et cohésion sociale divergent
Quand une situation est jugée mauvaise, n’oubliez jamais qu’elle peut considérablement s’aggraver. Il apparaît dans nos sociétés dites développées des contradictions entre la logique économique et la logique sociale. Et si nous n’en étions qu’à l’extrême début de ces contradictions.
La nécessité de l’innovation, l’importance de la responsabilité
Au sein d’une entreprise, les innovateurs ne sont pas des salariés comme les autres. Ils portent la responsabilité du monde de demain, de l’humanité aussi infime que semble être une innovation. Il est essentiel que l’innovateur comprenne son rôle et l’impact de ses produits et services sur les citoyens qu’ils soient ou non ses clients.
Pour changer, faut-il vaincre la résistance au changement ?
La vie est une structure de résistance au changement qui se nourrit d’énergie. C’est même ainsi qu’elle se définit. Mais bien sûr, la vie est beaucoup plus que cela puisque c’est aussi une structure productrice de changement, qui produit du changement en résistant au changement.
Pour une philosophie de la décroissance
Au moment où le GIEC revoit ses prévisions à la hausse concernant l’augmentation des températures, penser la décroissance devient nécessaire.
Comment augmenter le chômage ? De quelques idées pour en finir avec l’emploi
Regardez au-delà des Pyrénées où la lutte pour le chômage est bien plus avancée.
Du bon usage de la philosophie en entreprise
La philosophie ne peut se désintéresser de communautés humaines, a fortiori lorsque celles-ci sont aussi nombreuses et influentes que le sont aujourd’hui les entreprises.
La centralité du travail
Ce n'est pas parce qu'on rejette l'horrible « Arbeit macht frei » qu'on doit tomber dans la polémique illusion du « droit à la paresse » : dans Pour une philosophie du travail, Martine Verlhac propose de reprendre à nouveaux frais les analyses du travail.
Crise de la dette en Europe : comment réussir à échouer ?
La construction européenne est comme cela ponctuée de grands moments de lucidité. Nous allons illustrer la panne de l’intelligence stratégique avec la façon dont a été traitée la crise de la dette souveraine grecque.
Petite philosophie de la consommation
Chaque année, un Français jette en moyenne 20 à 30 kilogrammes de nourriture. S’il fallait que chaque humain en fasse autant, presque 200 millions de tonnes de nourriture seraient jetées chaque année dans le monde. A titre de comparaison, la production européenne de blé est de 125 millions de tonnes. Y a-t-il eu seulement une société avant la nôtre qui fit un pareil sacrifice de viande, de fruits et de légumes à une quelconque divinité ? La réponse est dans l’énormité des chiffres. Si nous savions de quelle divinité il s’agissait, nous serions bien les plus religieux de tous les hommes.
Y a-t-il des « agents rationnels » ?
Jean-Michel Muglioni s’étonne que des commentateurs respectés de la vie politique croient en la rationalité des décisions prises par les chefs d’Etat et oublient que la politique est d’abord affaire de passions, d’autant plus que l’enjeu n’est jamais seulement quelque intérêt égoïste, mais toujours l’honneur et la liberté.
La « faute à la crise »
Tu l’as voulu, George Dandin : c’est un économiste, Christian Arnsberger, qui le dit (Libération 19-03-2012 p. 24) . « L’actuelle architecture monétaire et financière […] est en tout point responsable de la crise qui nous frappe » et il précise que « les excès de l’obligation de croissance », inscrits dans cette organisation ont suscité de tels effondrements que la seule issue pour faire revenir la croissance paraît consister en une « brutale décroissance maquillée en cure d’austérité ».
Pour changer, ne vous adaptez pas
Il y a cinquante mille ans vivaient sur Terre deux espèces d’homme : homos sapiens en Afrique et l’homme de Neandertal en Europe. Comme les périodes glaciaires venaient régulièrement geler les orteils et autre choses de Neandertal en Europe, comme le chauffage central n’était pas inventé, ce fier chasseur était très adapté au climat froid. Homo sapiens quant à lui se prélassait dans les moites tiédeurs et les capiteuses délices de la savane, il n’était pas adapté au climat froid. Or donc voilà qu’homo sapiens dont la curiosité est le pire défaut quitte l’Afrique et vient en Europe. La rencontre entre les deux espèces a lieu sur le terrain de Neandertal.
Les inégalités économiques n’ont aucun sens moral
La tentative de justifier les inégalités économiques par des raisons dites « morales » comme la sanction de la « paresse » ou la récompense du « mérite » s’exprime désormais sans aucun complexe dans le débat public, à droite comme à gauche.
La déraison de l’économie
Lorsque les deux économistes nobélisés cette année ont déclaré que la crise actuelle ne remettait pas en cause la pertinence de la théorie économique, et que le grand coupable était l’impuissance du politique, mon sang n’a fait qu’un tour. Certes, les politiques ne peuvent rien faire mais n’est-ce pas parce qu’ils sont des sous-économistes, incapables de se déprendre des rets de l’idéologie économique ? Les économistes, c’est comme ces narcissistes pervers qui accusent leur proie de les victimiser.
Politique économique ou économie politique? Les obstacles sémantiques
La crise de la zone euro donne aujourd’hui à méditer ce lien entre le politique et l’économique. Elle invite à souligner le rôle de l’État – sa Souveraineté – qui détermine et norme son administration publique, mais aussi, plus largement, se doit d’affirmer ses positions ou décisions dans le cadre de relations transversales et hiérarchiques, celles des États membres qui, au sein de l’Union européenne, sont amenés à décider d’une ligne économique commune ; décisions qui se doivent de figurer et peser dans la mondialisation.
Œdipe et l’Euro
Les photos d'Athènes où des bâtiments en flamme brûlent dans la nuit réveillent pour les peuples européens la peur très ancienne de la dislocation de l'ordre politique. Au-delà de la crise économique et financière qui touche la Grèce, c'est bien ce chaos politique qui est à la fois le phénomène le plus inquiétant et le défi le plus important à relever. On ne peut manquer d'observer dans ces péripéties du peuple grec la forme presque pure de ce qu'il a lui-même inventé, la tragédie.