Jean-Michel Muglioni
Né en 1946, vice-président de la Société Française de Philosophie, Jean-Michel Muglioni a enseigné la philosophie pendant plus de trente ans en classes préparatoires, et jusqu'en 2007 en khâgne au lycée Louis-le-Grand. Agrégé de philosophie, il a également soutenu en 1991 une thèse de doctorat d'Etat sur la philosophie de l'histoire de Kant. Il contribue règulièrement à la revue de Mezetulle. Il a signé comme auteur La philosophie de l'histoire de Kant (Hermann, 2e édition revue 2011, 1ère éd. PUF, 1993) et Repères philosophiques (Ellipses, 2010).
ANALYSE : Alors que l’acte XVIII des «gilets jaunes» a été marqué par un regain de violences à Paris, le philosophe s'interroge sur les différences de réaction face aux violences, selon qu'elles sont commises par des manifestants ou des représentants de la République. Il y voit un dangereux rejet des institutions, nourri par le ressentiment d'une société qui se sent méprisée et dépossédée.
Une «foule électronique» n’est pas le peuple
BILLET : Les réseaux sociaux jouent un rôle essentiel dans le mouvement des «gilets jaunes». Adoubée par une communauté de passions, une simple déclaration de comptoir publiée sur Twitter ou Facebook peut s’inscrire dans les consciences, exploser dans la rue, se traduire en violence et menacer la notion même d’institution politique.
Croyances religieuses et mythes
ANALYSE : Jean-Michel Muglioni apporte un éclairage capital à la question de «l’enseignement du fait religieux» en appelant à rattacher ce dernier à l’usage rationnel des mythes. Dès qu’il est dissocié de la croyance en sa vérité factuelle, le mythe garde un sens et véhicule une forme de vérité méditative en la fixant poétiquement
Conscience, liberté et mécanismes cérébraux
ANALYSE : Jean-Michel Muglioni s’oppose à une thèse prétendument scientifique qui réduit la conscience à n’être que l’accompagnement de processus cérébraux non conscients. Il lui oppose un mouvement de révolte : une objection de conscience ! Il importe que chacun ose juger ce qui se donne comme des travaux scientifiques ou comme des jugements d’experts et sache dire non.
Le monde magique de la politique
ANALYSE : Soit un jeune homme, pris dès la sortie de l’enfance dans la vie politique, n’ayant pas d’autre monde que celui de ses relations, toujours nourri, logé, voituré : quel peut bien être son rapport au réel ?
La France se définit-elle par « une » culture ?
TRIBUNE : La République Française ne se définit pas par « une » culture, par opposition aux sociétés multiculturelles, mais par la citoyenneté, qui est la reconnaissance de principes.
La République exclut-elle l’islam ?
ANALYSE : Certains accusent la République française d’être islamophobe et raciste, sous prétexte qu’elle a opprimé les musulmans lorsqu’elle était une puissance coloniale. Ceux-là ont fait le lit d’un communautarisme totalitaire, puisqu’il enferme les individus dans leur appartenance ethnique et religieuse.
Jean-Michel Muglioni propose ici un début de réflexion sur la cause générale de la séduction du terrorisme. Une ère de terrorisme ne fait que commencer. Le vide intellectuel et moral de notre temps et la réduction de la politique à l’économie font le lit des fanatismes religieux, car les hommes ont d’autres exigences que l’argent. Pourquoi notre société a-t-elle des enfants perdus ?
La misonomie, ou haine des institutions
Lorsque la loi s'efface, elle laisse le champ libre au déploiement des "forces libres". Il faut lutter contre les lois injustes et les institutions destinées à installer et à perpétuer l'oppression, mais réclamer par principe l'effacement de toute loi et déclarer par principe que toute institution est mauvaise, c'est faire le jeu des pouvoirs - ceux qui nous oppriment à l'extérieur et ceux qui nous gouvernent à notre insu de l'intérieur.
Pourquoi s’attaquer aux stoïciens ?
Je me souviens d’une colère de Canguilhem, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, en 1968 ou 1969. Après une allusion au stoïcisme, il avait senti dans l’assistance quelque chose comme un mouvement de mépris. Quand tout va bien, on n’a pas besoin de morale, dit-il furieux, mais quand on en a besoin, il n’y a que le stoïcisme. Par exemple lorsqu’on est en camp de concentration. La formulation était plus percutante et plus belle. Nous savions qu’il avait été un vrai résistant.
Oui, nous avons un pape !
Faut-il s’en prendre au Pape ? Calomnies ou analyses historiques véridiques posent le problème de l’attitude de l’Église argentine pendant les années de la dictature. Jean-Michel Muglioni n’attend rien d’une enquête mais se contente d’une tautologie : un pape est un pape, il est chargé de la pérennité de l’Église et l’Église comme les vieillards est obsédée par le souci de sa conservation.
La décision d’une majorité peut-elle fonder l’autorité de la loi ?
Les lois votées à la majorité obligent ceux-là même des citoyens qui ne les ont pas voulues. A quelles conditions la volonté d’une majorité n’est-elle donc pas seulement la victoire du plus grand nombre sur le plus petit – car si tel était le cas, de quel droit obligerait-elle la minorité ? Une conception arithmétique de la majorité sape l’autorité des lois.
Y a-t-il des « agents rationnels » ?
Jean-Michel Muglioni s’étonne que des commentateurs respectés de la vie politique croient en la rationalité des décisions prises par les chefs d’Etat et oublient que la politique est d’abord affaire de passions, d’autant plus que l’enjeu n’est jamais seulement quelque intérêt égoïste, mais toujours l’honneur et la liberté.